L’apprentissage de la batterie
Ce blog n’étant pas un blog tutoriel destiné à apprendre un instrument, cet article ne donne que quelques bases de la batterie. Il se cantonne également, pour l’essentiel, aux rythmes binaires dont l’incontournable 4/4. Cela permettra aux futurs batteurs de mieux comprendre le monde qui les attend, mais aussi aux non batteurs, de se familiariser avec le travail de leur collègue tenant les baguettes.
Pour information, ce qui suit s’adresse aux batteurs droitiers, ce qui, dans certains cas, obligera les gauchers à traduire mes conseils dans « leur langue ».
Qu’ils m’en excusent d’avance !
Tout d’abord avant quoi que ce soit, en premier, déjà!
L’apprentissage de la batterie ne fait pas exception à l’apprentissage de tout autre instrument de musique. Cet apprentissage fait appel au corps mais aussi au cerveau qui, le premier, doit imprimer le mieux possible ce qu’il doit imposer ensuite, par réflexe, au corps. Pour cette raison, il faut toujours aborder les exercices avec patience et humilité. Inutile donc de vouloir réussir tout de suite des plans sur un tempo rapide et ne pas hésiter au contraire à les répéter longuement et précisément. Avec le temps seulement, les automatismes vont commencer à s’installer tant dans la tête que dans les membres.
À ce petit jeu, ne nous faisons pas d’illusion : personne n’est logé à la même enseigne et certains avanceront toujours plus vite que d’autres.
Au final pourtant, les plus « doués » ne finissent pas forcément les premiers et un timide débutant peut engranger lentement mais durablement des informations pendant qu’un autre va s’habituer à bâcler les exercices de moins en moins bien assimilés.
Voir sur ce sujet « le lièvre et la tortue » du batteur Jean De La Fontaine.
Pour finir, rappelons également qu’un apprentissage régulier d’une heure par jour vaut mieux qu’un travail de 6 heures chaque dimanche. Certes, le lundi suivant, jusqu’au mercredi peut-être, vous garderez encore de bonnes sensations, mais de retour le dimanche, vous aurez trop perdu et devrez quasiment recommencer à zéro !
L’avantage de l’apprentissage avec un professeur est de vous habituer à prendre de bonnes habitudes, de discuter des points noirs qui vous ralentissent et échanger des points de vue théoriques et pratiques. Malgré cela, si l’élève ne travaille pas sur son instrument entre chaque cours (qui est souvent hebdomadaire) il n’évoluera jamais.
Un autodidacte motivé vaut bien mieux qu’un élève feignasse et désinvolte.
On peut penser qu’il faut toujours aller plus loin, être au plus haut de ses capacités si l’on veut jouer tout et n’importe quoi avec sérénité. En gros, être une Ferrari plutôt qu’une Twingo. Dans l’absolu, c’est vrai, en pratique, certains musiciens se spécialisent et se cantonnent à un champ d’action qu’ils affectionnent. Votre vision des choses doit être cohérente avec ce que vous désirez devenir. Faire du rock avec des potes et devenir musicien professionnel de studio ne vous obligent pas aux mêmes contraintes. Se faire plaisir ou gagner sa vie avec la musique sont deux parcours différents.
Pour les plus talentueux et chanceux, toutefois, les deux parcours se confondent. Mais là, de toute façon, il faut avoir du talent et avoir beaucoup bossé !!
Solfège ou pas
Le solfège est la bête noire des musiciens. Depuis l’invention de la musique enregistrée et tous ses avatars (radio, télé, Internet, etc .) nous avons l’heureuse possibilité d’entendre la musique sans avoir besoin de déchiffrer une partition. Celle du batteur, toutefois, est un peu particulière puisqu’à chaque note ne correspond pas une hauteur, mais un élément du kit.
De ce fait, la partition de batterie est de lecture plus aisée.
Sur cet exemple, vous trouvez la place des éléments : la caisse claire occupe la place du do avec deux variantes. Une note vaut une frappe caisse claire et une croix, une frappe sur le cercle de la caisse claire, baguette posée à plat sur la peau. La grosse caisse est positionnée sur le fa, tandis que les toms descendent du fa à l’octave supérieur au mi à l’octave également jusqu’au la. La pédale charleston occupe la position du sol à l’octave en forme de croix. Le petit O indique que la pédale est jouée en étant ouverte, sans cela, la pédale est jouée fermée. Les cymbales, ride et crash, sont indiquées également par des croix situées toutes les deux à l’octave supérieur : fa pour la ride et la pour la crash.
( Les kits de batteries s’étendant du plus simple appareil à la batterie de cuisine de la Tour d’Argent, d‘autres éléments peuvent s’insérer dans ce type de partition, mais pour ce qui nous concerne, nous nous contenterons du minimum syndical ).
On notera les deux petites barres en début de mesure, à l’emplacement de la clef, qui indique qu’il n’y en a pas, justement ! Voilà plutôt une bonne nouvelle ! Quand au 4/4, il signifie que la mesure comporte quatre fois une noire. Le premier chiffre indique le nombre de temps, le deuxième, le type de notes correspondant à ces temps.
Pour mémoire, voici la numérotation usuelle des notes de la plus longue à la plus courte :
Une ronde = 1
Une blanche = 2
Une noire = 4
Une croche = 8
On comprend donc qu’une mesure en 4/4 correspond à 4 fois 4 noires et que, par exemple, une mesure à 5/8, bien moins répandue, correspond à 5 fois une croche.
Préliminaires
L’ assise, la tenue des baguettes, le métronome.
L’assise
La meilleure position à choisir est celle où vous vous sentez le plus détendu. Le batteur débutant passe parfois par diverses hauteurs d’assise avant de trouver celle qui lui convient. Certains batteurs professionnels jouent plutôt bas et d’autres, plus haut. C’est donc bien à vous de sentir l’assise qui vous convient en fonction de l’emplacement de votre caisse claire et de vos fûts, tout autant qu’en fonction des pédales de charleston et de grosse caisse. Concernant ces dernières, en effet, votre jeu avec les deux pieds ne doit pas vous déséquilibrer.
On a déjà expliqué les différentes façons de jouer avec la pédale de grosse caisse dans un autre article du blog (les rois de la pédale).

Wyatt, à gauche, avec Soft Machine, en position beaucoup plus haute sur son siège que Bonham,
à droite, avec ses jambes faisant un angle de 45 degrés.
La tenue des baguettes
Le tambour, joué jadis en fanfare par des soldats en marche, imposait la position suivante:

le tambour de la fanfare qui marche en jouant impose d’incliner la caisse claire,
ce qui induit une tenue de baguette différente des deux mains.
Les batteurs ont longtemps utilisé cette façon traditionnelle de jouer de la caisse claire, alors même que celle-ci était posée horizontalement. Les batteurs de jazz jouent encore couramment de cette manière, mais Charlie Watts, Stewart Copeland ou Carl Palmer, parmi des milliers d’autres batteurs de rock, également.
Pratiquement, selon les figures imposées, on peut jouer ainsi ou alterner avec ce deuxième grip :
Cette tenue de la baguette gauche, identique à la baguette droite, est tout à fait adaptée à la batterie disposant d’une caisse claire en position horizontale. Ce grip est apprécié des batteurs puissants.
Dans les deux cas, la baguette se tient de façon équilibrée, le poignet et la main permettant d’agir sur elle en la faisant pivoter sur un axe imaginaire traversant votre main. Nous allons revenir plus bas à la tenue de la baguette et plus spécifiquement à la frappe, sous le titre « la frappe ».
Il existe, indépendamment de ces deux tenues de baguettes, divers angles horizontaux, parallèles à la peau, constitués par les deux baguettes, mais cela dépend largement de votre préférence personnelle. Dans tous les cas, c’est le poignet qui travaille et non pas les bras ! Ne vous fiez pas, en effet, au jeu spectaculaire de certains batteurs jouant en concert.
En réalité, ils savent très bien manier les baguettes avec un minimum d’effort et « surjouent » pour la galerie ou/et appuient leur frappe parce qu’ils jouent à très fort volume.
Le métronome
Le batteur étant le métronome de l’orchestre, il est de son devoir de savoir garder le rythme avec le plus de précision possible. Si vous n’avez aucun rythme, à la base, je vous conseille plutôt autre chose que la musique, car, contrairement à une idée hélas très répandue, il ne suffit pas d’être juste pour être un bon musicien, le rythme étant aussi important que la mélodie. Par ailleurs, même si vous pensez posséder un assez bon sens du rythme, tout bon batteur cultive cet avantage au maximum.
Travailler avec un métronome n’étant pas très gai et exaltant, les débuts se font éventuellement en suivant un morceau simple d’un groupe que vous aimez. Vous pouvez également vous servir d’un séquenceur avec l’obligation toutefois de choisir un click qui s’entend bien. Le volume n’est pas tout : le son du click doit être le plus éloigné possible du son de votre batterie pour qu’il ne se confonde pas avec lui. Je choisis personnellement un son électronique genre « bip ». Lorsque vous jouez avec un click mal choisi, en effet, vous entendez le click uniquement quand vous êtes à la rue ! Lorsque vous êtes sur le bon tempo, vous ne l’entendez plus et vous n’avez alors plus le repère indispensable, ce qui est très con !
Si vous vous adaptez bien au métronome, un exercice assez facile à réaliser pourra encore vous améliorer : enregistrez un click sur votre séquenceur sur un nombre X de mesures que vous interférez avec des mesures muettes. Le but, bien sûr, est de pouvoir continuer à jouer en rythme sur ces dernières.
Dernière chose concernant la régularité de votre tempo.
Des petits malins se sont amusés à enregistrer des compositions récentes du hit parade réalisées avec des batteurs jouant avec un click. Puis, ils ont comparé ces enregistrements avec d’anciens enregistrements des Who, des Beatles, etc. Je n’ai pas retrouvé cette vidéo sur Internet et ne sait donc plus quel instrument de mesure a permis de pratiquer cette expérience. Le résultat, quoiqu’il en soit, démontre qu’effectivement, sans click, de bons batteurs professionnels peuvent faire des écarts indécelables de quelques fractions de secondes, ce qui n’est évidemment pas le cas avec un click. N’oublions pas que la musique est un art qui transmet l’émotion et qui pousse parfois l’instrumentiste à sortir légèrement du rang. Cela doit nous rassurer et nous permettre d’aborder les exercices avec métronome de façon détendue.
L’être humain est imparfait et peu d’entre nous peuvent se targuer d’avoir le click absolu, sans doute moins encore que les humains possédant l’oreille absolue. Le but est donc de remplacer l’exactitude du métronome avec nos imperfections d’humains, et il faut d’autant plus s’en contenter que des millions de batteurs de par le monde réussissent très bien la performance.
Le plat de résistance
Maintenant que nous nous sommes installés confortablement devant notre instrument en tenant nos baguettes comme nous l’avons indiqué, nous allons aborder les deux pôles essentiels de l’apprentissage de la batterie. L’usage du métronome sera plus ou moins régulier selon votre ressenti.
Personnellement, je n’ai jamais joué avec un métronome avant l’utilisation d’un séquenceur. Et soyons franc : nous sommes tous dégoûtés rien qu’à l’idée d’avoir à suivre un métronome !!
La frappe
Avant de faire un tour d’horizon des différents rudiments du tambour militaire, il est bon de préciser que les peaux d’une batterie, et plus encore les cymbales, permettent d’utiliser le rebond. C’est même une des bases essentielles de cet instrument. En théorie, la baguette, en frappant la peau, rebondit naturellement, et le batteur doit profiter au maximum de ce rebond. En pratique, cela veut dire que vous devez laisser remonter la baguette en position initiale après la frappe. Cela est d’autant plus important que vous jouez à des tempos rapides. Pour se faire, il convient que vous trouviez le point d’équilibre de la baguette en utilisant ensuite vos mains en tant que pivot. Théoriquement, la meilleure façon de jouer est donc de frapper toujours vers le bas et de laisser le rebond faire le travail du retour. Vous gagnez ainsi le retour sans vous fatiguer.
Les illustrations suivantes expliquent le processus :
En 1, vous avez votre baguette prête à frapper. En deux, la frappe proprement dite qui, avec le rebond, envoie à la position 3 qui est identique à la 1, soit, de nouveau en position de frapper sans que vous n’ayez eu le besoin de remonter la baguette.
Les rudiments du tambour militaire
Les exercices de tambour militaire viennent de très loin et restent les exercices de base qu’on pratique à la caisse claire. En réalité, bien qu’on les pratiquât jadis uniquement sur un tambour, le batteur va pouvoir utiliser tous ses éléments de kit de batterie. Il peut même alterner frappes à la main avec frappes au pied alors qu’au départ, les exercices ne concernent que les deux mains. Tenez vous en là néanmoins, dans un premier temps.
Bien que la technique du tambour militaire ne se limite pas aux trois exemples dont nous allons parler, la plupart sont ensuite de nombreuses variations de ces trois types de frappe.
Le petit frisé, le papa maman et le moulin
Le frisé
La technique du « frisé » ou « bâton rond », encore appelé « single stroke » dans la langue de Trump, utilise alternativement les deux mains : gauche droite gauche droite etc. Mais aussi droite gauche droite gauche etc. Cela paraît enfantin mais le devient beaucoup moins à mesure que le métronome s’accélère! D’autre part, cet exercice met très vite en exergue la différence de force et de précision entre les deux mains, selon qu’on est gaucher ou droitier.
À ce titre, les ambidextres sont à la fête mais les autres doivent s’habituer à jouer en débutant alternativement avec la main droite, puis la main gauche. On peut même s’exercer plus souvent en commençant de la main la moins habile pour tenter de rétablir l’équilibre d’agilité entre les deux mains. Ceci s’applique à tout ce qui suit.
Le papa maman
Le papa maman (double stroke) , lui, impose de jouer deux coups de chaque main : gauche gauche, droite droite etc. Cet exercice met en évidence le phénomène de rebond dont nous avons parlé peu avant. Le papa maman est la façon la plus évidente d’effectuer les fameux roulements de caisse claire que nous connaissons tous, même si ce qu’on appelle roulement peut s’effectuer d’autre manière.
Ce phénomène de rebond bien utilisé, permet à certains batteurs de ne pas se contenter de deux frappes de chaque main mais de trois, voire quatre. Christian Vander, par exemple, montre dans une vidéo comment il réalise un roulement avec 5 frappes par main. Il existe même une technique de roulement avec une seule main, utilisant le cercle métallique de la caisse claire, mais toutes ces variations de roulement qui paraissent simples à regarder demandent beaucoup d’entraînement et le batteur débutant se contentera dans un premier temps de faire un beau papa maman avant de faire le malin !
Le moulin
Assez logiquement, le moulin (paradiddle), alterne les deux techniques dont nous venons de parler, soit le frisé et le double stroke. droite gauche, droite droite, gauche droite, gauche gauche et réciproquement. On commence donc en frisé un coup de chaque main, puis, on enchaîne avec un pa-pa d’une seule main, puis de nouveau un frisé qui nous amène à un nouveau deux coups ma-man avec l’autre main. Cette exercice habitue évidemment le batteur à alterner deux méthodes qui sont les plus utilisées et peut se compliquer à l’envie selon l’endroit où commence l’exercice, comme l’explique ce petit dessin :
Ce qui est entouré d’un filet noir montre le moulin comme énoncé précédemment, soit main droite (D), main gauche (G), puis double stroke droit (DD), puis on recommence le frisé, cette fois, avec la main gauche, puis main droite, pour finir avec double stroke main gauche. Mais il est clair qu’on peut s’exercer en commençant par la position 2, 3.. jusque la position 8, qui est entourée de vert.
Les petits malins rétorqueront qu’au bout de plusieurs moulins, on se retrouvera de toute façon avec une des 8 variantes puisque le flux est continu. C’est vrai uniquement si on ne tient pas compte des temps forts et faibles. En 4/4, par exemple, le premier et troisième temps, joués à la grosse caisse sont les temps forts et le 2 et le 4, les faibles, joués à la caisse claire, pourtant bruyante, mais c’est comme ça !
Apprendre à jouer les différentes versions en suivant le rythme des temps forts et faibles va nous amener à faire cette constatation :
L’exemple numéro 1 est un moulin « classique » avec G D G G D G D D, alors que le deuxième est décalé et débute en ignorant le premier coup de la main gauche. L’ordre de jeu du moulin est donc décalé et devient D G G D G D D G. On constate que la première croche à la caisse claire jouée à la main gauche tombe sur le premier temps de la grosse caisse de la mesure dans l’exemple 1 alors que c’est la main droite qui joue ce rôle dans l’exemple deux. Ainsi , dans l’exemple 1, la main gauche frappe en même temps que la grosse caisse dans la première moitié de la mesure, alors que c’est la main droite qui joue ce rôle dans la deuxième moitié de mesure.
L’exemple 2, lui, fait alterner main droite et gauche sur les temps de grosse caisse.
Anecdotique, mais rigolo :
La musique, comme on le sait, est affaire de mathématique. C’est d’autant plus parlant et simple avec la batterie qu’on ne tient pas compte de hauteurs de notes.
Ici, avec notre moulin qui est constitué de 8 coups pour être complet, il existe donc mathématiquement 8 façons différentes de l’exécuter. Et voilà qui est magique : suivant notre correspondance temps faibles, temps forts, voici 8 manières de se compliquer la tâche pendant des années avec une caisse claire jouée aux mains et une grosse caisse et une charleston aux pieds ! La figure du moulin est indiquée en bleu. Sur la partie supérieure de chaque double ligne horizontale, un rond rouge figure une frappe caisse claire main droite et un rond vert, la frappe main gauche. La ligne du bas montre l’alternance entre grosse caisse en noir et charleston en jaune, jouées simultanément avec la caisse claire.
À gauche est notée la correspondance entre la grosse caisse et les frappes caisses claires.
À droite, les correspondances entre charleston et frappes caisse claire. On remarque qu’à chaque figure, la grosse caisse et la charleston se retrouvent toujours couplées à deux temps de caisse claires de chaque main. La logique est purement mathématique donc, mais la pratique autrement plus difficile à intégrer !
Je vous déconseille donc vivement d’apprendre ces 8 figures inutiles pour commencer la batterie.
Contentons nous simplement d’admirer cet art des chiffres quelques instants et passons à la suite !!!

Notation absolument fantaisiste qui a le mérite toutefois d’être plus clair qu’une partoche pour le néophyte !
Les accents
Si les rudiments s’apprennent dans un premier temps à force régulière, pour un jeu du même métal, ils se jouent également avec les accents, le fla constituant le rudiment de ce type le plus connu. Comme leur nom l’indique, les accents appuient la frappe. A l’inverse, les notes fantômes (ghost notes en anglais) sont des frappes extrêmement légères, à peine perceptibles. Que ce soit en frisé, en double stroke ou en moulin, les accents peuvent se situer à n’importe quel endroit du motif travaillé (pattern en anglais). Les exercices concernant les accents sont déjà, dans leur essence, des exercices d’indépendance puisqu’ils apprennent au batteur à savoir gérer précisément la puissance de chaque main indépendamment de l’autre, et ce, au sein d’un motif répétitif. Bien entendu, les accents sont des variations de puissance et sont donc en rapport avec la puissance moyenne.
Sur la partition, on utilise cette sorte de V inversé que vous pouvez voir sur la première noire de cette mesure pour noter les accents, alors que les deux noires suivantes qui sont des ghost notes sont entourées d’une parenthèse.

trois valeurs de frappes sont ici indiquées.
La dernière note est jouée normalement alors que la première est accentuée et que les deux suivantes sont des ghost notes.
Conclusion rudiments
Comme on le voit, ces rudiments de caisse claire apprennent non seulement à maîtriser la frappe, mais vont également ouvrir d’infinies possibilités au batteur qui peut utiliser ces techniques sur les éléments constituant son kit de batterie.
Il existe d’autres exercices de tambour militaire dont le fla que je n’aborde pas ici, mais je vous invite à aller sur ce site qui explique en détail toutes les autres finesses de la technique du tambour militaire :
http://www.marcdedouvan.com/lecon.php?id=5
Notons la qualité impressionnante de ce site que je vous invite vivement à lire en détail.
L’indépendance
Le deuxième gros morceau de l’apprentissage de la batterie est donc l’indépendance. C’est un mot qui fait peur au débutant, mais pratiquement tous les instruments font appel à l’indépendance. Le pianiste travaille avec deux mains qui ne jouent ni les mêmes notes, ni le même rythme. Le guitariste a besoin d’indépendance puisque sa main droite gratte les cordes qui produisent le son que la main gauche joue sur la touche, etc.
Pour le batteur, on vient de voir que les deux mains doivent également savoir jouer de façon différente lorsqu’il s’agit notamment de jouer des accents ou des ghost notes. En parallèle, le batteur doit néanmoins travailler également avec ses deux pieds. Les techniques particulières de talon pointe, pointe, talon etc. sont abordées pauvrement dans l’article du blog concernant les pédales de grosse caisse. Si je ne vais pas plus en profondeur sur ce sujet, c’est que je n’en ai pas les capacités théoriques, et encore moins techniques ! Pour ma part, par ailleurs, quelque soit la technique utilisée, j’ai la ferme conviction que la vélocité pédestre du batteur est plus question de pratique sérieuse que de recettes magiques, même s’il ne faut pas négliger les conseils de batteurs expérimentés qui postent des vidéos tutorielles sur Internet.
Ici, donc, je me bornerai encore à vous indiquer les bases de l’apprentissage en matière d’indépendance. Comme toujours, ne commencez pas avec un pattern trop rapide, mais apprenez à bien découper vos phrases rythmiques.
Notre premier exercice est simple et consiste à jouer cette mesure que vous répétez autant de fois que vous voulez, avec un métronome ou même avec un morceau de rock basique en 4/4.
En effet, bien que simpliste à l’extrême, cette mesure est la base même du rock en 4/4. Avec ce pattern, vous pouvez jouer en effet sur une multitude de morceaux, du moment qu’ils sont en 4/4 ! La différence avec le batteur que vous suivrez est que celui-ci y inclut des contretemps et autres finesses que vous aborderez un peu plus tard, mais pour l’instant, le but est d’habituer votre cerveau à coordonner parfaitement votre temps de grosse caisse et celui de la caisse claire avec votre main droite qui, elle, joue les quatre temps sur la charleston (ou la cymbale ride).
Beaucoup de patterns de batterie n’utilisent en effet le pied gauche qu’en position basse pour garder la charleston fermée. Ce premier exercice n’utilise donc, en réalité que les deux mains et le pied droit.
On note que cet exercice est ici en 4/4, mais qu’on peut le diviser en deux parties identiques de deux noires, soit une mesure à 2/4, typique des marches en musette, par exemple.
Temps forts et temps faibles
Traditionnellement, le premier temps des mesures en 4/4 est considéré comme un temps fort, suivi de trois temps faibles. En pratique, dans le rock et ses dérivés plus ou moins proches, on considère plutôt que les temps forts sont le premier et le troisième et sont joués sur la grosse caisse. Ce principe de temps faible et fort est toutefois à considérer avec circonspection à mesure que les patterns deviennent plus complexes, le talent des batteurs étant justement de respecter cette convention tout en la contournant afin de créer des tensions et des groove plus ou moins élaborés. C’est ce qu’on appelle garder le back beat ou l’after beat, soit savoir rester dans un 4/4 tout en sachant l’élaborer selon les besoins de la musique. Pour le batteur débutant, on s’en tient donc à garder ce back beat.
Le deuxième exercice d’indépendance que nous allons aborder est nettement plus sexy que le premier. La difficulté consiste, cette fois, à ce qu’une frappe de charleston fermée sur deux n’est pas accompagnée d’une frappe caisse claire ou grosse caisse. Certains pédagogues encouragent de compter en même temps de un à quatre en intercalant des « et » entre chaque chiffre.
Le un et le trois s’accompagnent d’une frappe au pied sur la grosse caisse ainsi que sur la charleston et le deux et le quatre d’une frappe sur la caisse claire et la charleston. Les « et », quant à eux, correspondent aux frappes uniquement sur la charleston.
Comme nous sommes toujours en 4/4, il vous est toujours possible de jouer une composition en 4/4 avec un batteur, même si, là aussi, ce pattern est pour le moins basique. Basique, mais pertinent du point de vue de la signature rythmique.
Ce troisième exercice est ce qu’on pourrait appeler le pattern rock universel. Par rapport au deuxième exercice, la seule différence réside dans le fait qu’on joue cette fois deux croches à la grosse caisse au lieu d’une noire. La deuxième note en effet, tombe sur un « et » et non plus sur un chiffre. Dans le principe, la difficulté n’est pas beaucoup plus grande et la pratique permettra au débutant de s’y adapter assez rapidement !!

Un exercice simple qui demande juste à être exécuté d’abord lentement pour bien se l’enfoncer dans la tête !!
Le quatrième et dernier exercice peut paraître plus facile car les frappes charleston sont des noires et non plus des croches : on va arrêter de courir ! Dans les faits, il est plus compliqué car la troisième frappe de grosse caisse tombe entre deux frappes de charleston, soit à contretemps de cette dernière. C’est pour cette raison qu’on s’habitue à compter 1 ET 2 ET 3, etc.
Les « ET » qui s’insèrent entre chaque temps sont des contretemps par rapport aux temps joués à la charleston. Tout étant relatif, en effet, si la charleston jouait des croches, le temps de grosse caisse (en rouge) ne serait plus à contre temps.
La principale difficulté ici, relève précisément de l’indépendance des membres (ici, les deux mains et le pied droit, le gauche ne servant qu’à garder la charleston en position fermée). La seule façon de bien intégrer ce pattern de base est de le jouer d’abord très lentement, puis de passer seulement à un tempo plus rapide quand la figure s’impose naturellement au cerveau et au corps.
Conclusion
Peut-être avez vous l’impression que ce petit article à la con ne vous a pas appris grand chose de révolutionnaire. Si vous avez déjà commencé l’apprentissage de la batterie, vous avez certainement déjà pratiqué des exercices identiques et il vous reste surtout à continuer à les jouer. Néanmoins, même à ce stade, tout ce qui est dit ici est la base immuable de l’apprentissage de la batterie : rudiments et indépendance sont les deux mamelles de la batterie disait Henry IV qui n’était pas la moitié d’un con.
Dans cet article, j’ai exclu le travail du pied gauche au minimum, alors que les batteries à double grosses caisses, jadis, et les doubles pédales du même métal d’aujourd’hui, exigent un jeu égal aux deux pieds. Les batteurs d’exception en sont aujourd’hui à jouer aussi rapidement avec les pieds qu’avec les mains. Leurs rudiments de caisse claire sophistiqués interfèrent avec une indépendance exigeante d’où il ressort qu’on se demande comment un seul homme ou une seule femme peut faire autant de choses à la fois, avec autant de vélocité.
Toutefois, avant d’en arriver là, le chemin est long, voire inaccessible pour beaucoup d’entre nous, ne nous leurrons pas. Mais rien n’est perdu pour autant, car la batterie sert la musique qui, elle-même, laisse autant la place aux musiciens simples mais efficaces qu’aux bêtes de cirque. On peut rester le cul par terre en regardant jouer Mike Portnoy de Dream Theater et savoir apprécier les idées simplissimes de Ringo Star. Avant d’en finir pour aujourd’hui, je reviens sur deux choses que j’évoquais plus haut.
L’alchimie des éléments
Le kit de batterie, tel que l’a conçu Gene Krupa, et qui s’est ensuite développé, est un ensemble très cohérent qui mêle la basse fondamentale puissante de la grosse caisse au claquant de la caisse claire, aidés par les métaux que sont les cymbales de charleston et la ride. Le tout est ensuite étoffé des timbres ethniques des toms et des fracas de cymbales. C’est l’alliance des timbres différents du kit de batterie qui en constitue un instrument cohérent.
Bricolo musicien
Même si je vous encourage à connaître au mieux le solfège ne serait-ce que pour mieux lire les partitions qu’on trouve un peu partout dans les magazines spécialisés et sur Internet, le batteur débutant commence toujours par imiter les rythmes de ses groupes préférés. Or, quand il ne maîtrise pas la notation sur partition, il est toujours possible de se repérer avec des patterns simples. Dans ce cas, en effet, la charleston ou la cymbale ride jouent en noires ou en croches et constituent une sorte de chemin de fer sur lequel s’inscriront ensuite la caisse claire et la grosse caisse. C’est de cette façon que nous avons expliqué les différentes possibilités mathématiques de la pratique du moulin. Les frappes de la ride ou de la Charley sont donc dessinées sous la forme de barres verticales et la caisse claire et la grosse caisse sont notées sous la forme de points. On retrouve d’ailleurs ce type de notation sur certains séquenceurs, preuve que cela fonctionne parfaitement.
Voici donc, sous cette forme rustique mais efficace, le fameux Poum tchac poum poum tchac avec la charleston fermée et frappée à la main en croches.
Le back beat avec le troisième temps grosse caisse en contre temps :
L’introduction de When The Levee Breaks de Led Zeppelin, que John Bonham joue sur la majeure partie du morceau.
Et pour finir, l’intro de Walking In Your Shadow de Uriah Heep. Thème également repris à profusion durant la chanson.
Vous constaterez que mes références datent d’à peu près quatre siècles, mais en musique, l’adage qui dit que « c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes » reste valable.
Alors à vos baguettes, et top moulin !